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Plusieurs pièces d'un important procès
qui eut lieu en 1604, devant la cour du parlement de Bordeaux et la chambre
des Aides de Paris, opposant Arthus Lecomte, baron de La Chaume à Pierre
Lemoine, sieur de La Massonne, montrent que la seigneurie de La Massonne
était un démembrement de celle de Bresneau, relevant directement du Roi, et
que Pierre Lemoine venait d'y faire bâtir une maison forte, sans "aucuns
fossés ny pont levis avec seulement un petit cul de lampe qu'on appelle pour
le service des chambres… avec quelques petites canonnières… conformément à
celles du lieu noble de Bresneau duquel est sorti ledit lieu de la Massonne
par partage fait entre les autheurs des parties, avec le droit de tenir le
lieu de La Massonne en pareils droits, prérogatives et prééminences que
ladite maison de Bresneau…" ce que contestait Arthus Lecomite, lequel
voulait faire démolir tout ce qui venait d'y être construit, y compris la
fuie. Si Pierre Lemoine eut gain de cause à propos de la construction de son
logis et des symboles de noblesse qui s'y rattachaient, comme le droit de le
faire fortifier, en revanche, un arrêt du parlement de Bordeaux le condamna
à faire hommage à Arthus Lecomte, pour sa maison noble de La Massonne, et à
lui montrer ses titres. Un accord que passa son fils avec la dame de Blénac
et de Bresneau, en 1648, apprend que la seigneurie de La Massonne s'était
constituée selon un acte de partage du 2 juin 1564. Pierre Lemoine, second
du nom, époux de Madeleine Pastru, laissa une fille, Marie, qui épousa en
secondes noces, en 1684, Henri-Auguste Salbert, écuyer, seigneur de Forges.
Celui-ci vendit La Massonne dix ans plus tard, moyennant 20 000 livres, à
Isaac Heurtin, capitaine des vaisseaux du Roi au port de Rochefort, où il
mourut peu de temps après, en 1698. Cette année là, il était d'ailleurs en
procès avec le baron de La Chaume à qui il refusait de payer les droits de
lods et ventes. Après la mort de son mari, Marie Lemoine contesta l'acte de
vente de 1694 et obtint, en 1702, des lettres royaux de restitution. Elle
attaqua alors Suzanne Galland, veuve d'Isaac Heurtin, mais perdit son procès
et ne put faire casser le contrat de vente. Sa fille aînée, Marie-Jeanne
Heurtin, épousa François de Mariol auquel elle apporta la terre de La
Massonne. Leur fils, Isaac de Mariol, puis leur petit-fils,
Nicolas-Barthélemy époux d'Anne-Françoise Salmon, furent ensuite seigneurs
de La Massonne. Ce dernier laissa une fille, Marie-Anne, qui épousa en
premières noces, en 1759, Hippolyte d'Aiguières de Richemont, capitaine au
régiment de Brancas-Infanterie, puis en secondes noces, Léon de Beauchamps,
dont elle était veuve au moment de la Révolution. En 1811, Marie-Anne de
Mariol, veuve Beauchamps, vendit le domaine comprenant 135 hectares, pour 35
000 francs, à François Lamoureux.
Le corps de logis construit vers 1600 n'a pas été achevé, l'aile gauche se
limitant à la cage d'escalier. En L, il est flanqué, sur l'angle extérieur,
d'un pavillon aujourd'hui dérasé, percé de trous de tirs et encore doté
d'une petite bretèche sur une de ses quatre faces. La façade antérieure est
flanquée d'une petite échauguette couverte d'une coupole. Deux petites
fenêtres passantes en lucarne éclairent les combles en surcroît du logis.
Elles sont encadrées par de petits pilastres supportant un fronton
triangulaire. On accède au vestibule par une porte surmontée par un curieux
décor sculpté, d'inspiration Renaissance, très tardif. La fenêtre située
au-dessus possède un chambranle décoré de rosaces naïves. Il faut
particulièrement remarquer le détail de sa partie supérieure droite: le
sculpteur, fautivement, n'ayant pas calculé la place que prendraient ces
motifs, et n'ayant pas commencé le décor des deux chambranles au même
niveau, a dû loger dans l'angle de droite une demi-rosace maladroitement
raccordée. Ce petit détail en dit long sur les bâtisseurs du règne d'Henri
IV, en Saintonge, optant pour des formes rustiques, des plans dissymétriques
et ne maîtrisant pas le vocabulaire décoratif emprunté de façon empirique et
maladroite. La Massonne est un excellent exemple de ces petites
constructions seigneuriales qui virent le jour en Saintonge après
l'avènement d'Henri IV et la paix retrouvée et qui a l'avantage d'être
aujourd'hui clairement datée, grâce aux pièces du procès de 1604, ce qui
nous permet de la regarder d'un œil nouveau. (1)
château de la Massonne 17620 La Gripperie-Saint-Symphorien, propriété
privée, ne se visite pas.
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