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Le
château de La Morinerie, situé sur une petite hauteur, se remarque d'assez
loin. Il faut le découvrir le soir, lorsque le soleil couchant illumine de
tous chauds sa façade sur cour. Ce très long corps de bâtiment était
paradoxalement situé sur un fief modeste. Son premier propriétaire connu
avec certitude est Pierre Senné, seigneur de La Fourest de Plassay,
capitaine des ponts, portes et tours de la ville de Saintes, habitant le
logis noble de La Morinerie, paroisse d'Écurat, en 1593. En 1618, par le
mariage de Charles Duval, sieur de Varaise, avec Catherine Senné, le logis
entra dans les possessions de la famille Duval. De leur mariage naquit entre
autres Guillaume Duval, marié en 1659, à Marie Ferrand, fille de Gabriel,
procureur au présidial et élection de Blois. Pourvu d'une solide fortune,
Guillaume Duval s'attacha, sa vie durant, à étendre ses possessions autour
du fief de La Morinerie, achetant dès 1671, la seigneurie de
Saint-Georges-La-Valade à Saint-Porchaire, puis en 1678, celle de La
Motte-de-Coutiers et de La Frégonnière, et enfin, en 1679, celle de Plassay.
Dès 1670, il avait entrepris de faire rebâtir son logis noble de La
Morinerie sous la conduite de l'architecte saintais Jacques Guérinet qui
s'était notamment illustré auparavant à la reconstruction des ponts de
Cognac et de Javrezac, sous les ordres de l'intendant d'Aguesseau, et à la
réparation des voûtes de l'église de Gémozac. Sur place, il dirigeait une
équipe de maçons et de tailleurs de pierre venue du Limousin. En 1691, le
fils de Guillaume Duval, Pierre, s'installait dans l'office de trésorier de
France à Poitiers où il mourut peu de temps après, célibataire.
Guillaume Duval décéda à La Morinerie, onze ans plus tard, laissant une
fille unique, Marie, mariée en premières noces, en 1686, à Louis Poitevin,
seigneur de La Caranderie en Touraine, trésorier de France en Poitou, puis
en secondes noces, à Jean-Baptiste Pissonnet de Bellefonds, seigneur de La
Gendronnerie, commissaire de la Marine au port de Rochefort. Selon les
volontés testamentaires de Guillaume Duval, la maison noble de La Morinerie
et "tous les bastimens en dependans par lui bastie située en ladite paroisse
d'Escurac avecq les fiefs terres et seigneuries de La Motte-de-Coutiers et
La Frégonnière", revinrent à son petit-fils, Louis-Nicolas Poitevin,
conseiller du Roi et son procureur en l'élection de Saintes, marié en 1729,
à Marie-Charlotte Pain, qui laissa une nombreuse postérité dont
Charles-Louis, aîné, seigneur de Moléon en Rouffiac et Jacques-Nicolas,
avocat au parlement de Bordeaux, marié à Françoise du Mesnil-Simon qui
devint seigneur de La Morinerie. Leurs descendants gardèrent le château
jusqu'en 1895, date à laquelle ils le vendirent en très mauvais état à
Gaston Charrier, maire de Plassay, dont descendent les actuels
propriétaires. Une analyse archéologique a permis de montrer que la
précédente maison noble s'élevait en bordure de la route d'Écurat à Plassay,
comme le montre encore l'arrachement d'une petite tour, un des seuls
souvenirs qui reste visible. L'édifice dû à Guillaume Duval fut construit
plus au nord-ouest et ne fut vraisemblablement jamais achevé.
Le grand corps de logis prévu par Jacques Guérinet devait à l'origine
mesurer plus de 80 mètres de long, comprendre un pavillon central à étage
coiffé d'une toiture en carène et deux longues ailes basses de six travées
terminées par deux gros pavillons presque carrés à étage, coiffés d'une
haute toiture d'ardoise. Si la partie nord-ouest a été entièrement réalisée,
en revanche l'aile sud-est n'a été construite qu'aux deux tiers et le
pavillon arrêté aux fondations. De même, seule l'aile droite des dépendances
a été achevée. Aujourd'hui sans toiture et ayant perdu ses voûtes, elle
possède encore un gros pavillon. Pour des raisons que nous ignorons, plutôt
que de faire achever le bâtiment initialement prévu, il fut doté d'une
longue aile en retour d'équerre, à l'ouest, d'une facture médiocre et l'on
fit surélever le sol du vestibule octogonal contenu dans le pavillon
central, comme l'attestent des traces de reprises dans la maçonnerie, ce qui
a sans doute contraint les entrepreneurs à remonter les portes d'entrée et à
édifier deux perrons, un côté cour, l'autre côté jardin, qui n'étaient pas
prévus à l'origine; tout cela vraisemblablement du vivant de Guillaume
Duval. Parmi les transformations ultérieures, il faut noter que les toitures
des ailes étaient plus basses et recouvertes de tuiles canales jusqu'à la
fin du XIXe siècle. C'est au cour des travaux de restauration effectués pour
Gaston Charrier que l'on a rehaussé le niveau des toits et qu'on les a dotés
d'ardoise. Bien qu'inachevé, le château de La Morinerie reste
incontestablement une des plus belles demeures de la seconde moitié du XVIIe
siècle, en Charente-Maritime, profondément influencée par l'architecture
militaire, mais aussi par quelques touches maniéristes tardives. (1)
Éléments protégés MH : les façades et les toitures du château : inscription
par arrêté du 3 décembre 1969.
château de la
Morinerie 17810 Écurat, propriété privée, ne se visite pas
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