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Le château de la Chapelle-Chaussée, commune du
canton de Bécherel, dans l'arrondissement de Rennes, fut reconstruit à la
fin du XVIe siècle à côté d'un manoir plus ancien dans l'esprit nouveau d'un
édifice symétrique à avant-corps latéraux. Toutefois, jusqu'au XIXe siècle
la façade principale demeure orientée vers le nord, au fond d'une cour que
fermaient des communs, le long du grand chemin de Rennes à Dinan. Cette
façade, en pierre de taille de granite, ordres superposés et lucarnes
sculptées, enjolivée de deux tourelles d'aisselle surmontées de dômes à
lanternons, coiffée de hauts toits en pavillon, prétendait rattacher la
demeure au modèle du château classique, selon un schéma de composition déjà
défini au château de Madrid, construit dans le Bois de Boulogne pour
François 1er, entre 1527 et 1551. Un ensemble de huit dessins, conservés
dans une collection particulière concerne la restauration, en 1834 de la
façade sud du château, alors propriété de la famille du Verdier de
Genouillac qui désire réorienter l'édifice vers le parc. Les deux premières
planches non signées et d'une exécution médiocre (sont-elles d'un amateur?)
correspondent à un premier projet de transformation. L'entrée y est reportée
au Sud, au milieu d'une façade achevée en symétrie par rapport à la tour
d'escalier déjà existante. La nouvelle porte, d'un style gothique naïf
contredit le décor général du château et ouvre sur une terrasse bordée
d'appuis de fonte à l'antique révélant assez l'éclectisme du temps.
Le plan joint aux élévations indique les deux escaliers en vis prévus pour
la façade sud reconstruite, détachés cette fois de la grande salle centrale
par l'interposition de sas d'entrée. Toutefois un tel projet, s'il n'en
relevait pas moins du pittoresque, n'apportait que peu de modifications à la
distribution de l'édifice toujours privé du hall d'entrée cher au XIXe
siècle. C'est sans doute cette raison qui fit préférer le projet de
l'architecte rennais Louis-Guy Richelot auteur de six autres dessins signés
et datés du 8 octobre 1834. Ce dernier, au lieu d'une élévation similaire à
celle de la façade nord, propose un parti tout différent et resymétrise ses
deux ailes réalignées, trois travées forment un avant-corps qui contient un
nouvel escalier. Dans le nouveau volume ainsi dégagé, en forme de rectangle
allongé, l'architecte propose un vaste escalier d'apparat à deux rampes
divergentes, toutefois dépourvues de vide central. Au delà du premier repos,
une rampe d'appui métallique légère, substituée au mur d'échifre, devait
permettre le développement d'une véritable scénographie. A l'étage, l'ancien
mur de façade du château, entièrement ouvert sur le palier, est remplacé par
un portique dorique de quatre colonnes formant une véritable composition
monumentale. On peut s'étonner de l'ampleur d'un tel projet comparée aux
dimensions modestes du château lui-même. Louis-Guy Richelot, élève de
l'architecte parisien Joseph-Marie Peyre, revint de son voyage en Italie
rempli d'admiration pour l'oeuvre de Palladio.
Quatre ans après la construction de son propre hôtel particulier à Rennes
(1830), véritable manifeste néo-palladien dans lequel l'escalier, en
position centrale tient une place et un rôle considérables, le projet
d'escalier pour la Chapelle-Chaussée confirme ce goût de l'architecte et
aurait certainement donné naissance au plus bel exemple d'escalier
néo-classique des environs de Rennes. En fait, l'architecte Richelot dut
sans doute composer avec les désirs et les moyens financiers du propriétaire
d'alors, et l'escalier réalisé n'est qu'un reflet affadi du projet initial.
Au rez-de-chaussée, à la place des deux rampes divergentes on ne retint
qu'un départ unique, à gauche de l'entrée. Du même coup, la transparence
entre les niveaux n'était plus souhaitable et le mur d'échiffre fut maintenu
plein jusqu'au palier de l'étage où l'on se contenta d'ailleurs de deux
colonnes au lieu des quatre prévues. Une restauration récente, empreinte du
goût néo-rustique, a dépouillé les murs de la cage de leurs plâtres,
supprimé l'entablement du portique et affaibli davantage la référence
néo-classique. Le nouvel escalier conçu en 1834 pour le château de la
Chapelle-Chaussée est une bonne illustration du talent de l'architecte
Richelot. Sa forme très spectaculaire et très nouvelle alors dans les
environs de Rennes s'abrite derrière une façade très sobre, en bonne
harmonie générale avec le reste de l'édifice. La présence:des hauts toits à
la française excluait tout traitement palladien de l'extérieur, ce que
l'architecte a fort bien compris.
Dans ce projet qui devait donner aux transformations du château leur
véritable dimension le nouveau parc, séparé en deux par la route de Rennes à
Dinan est relié en i par une poterne ou passage souterrain. Tout autour de
la partie sud, là où s'interrompent les masses boisées, des sauts-de-loup
devaient maintenir la vue dégagée sur la campagne environnante. Ce choix des
sauts-de-loup est particulièrement important sur le côté nord du château où
il correspond certainement à la volonté de donner l'illusion d'un espace
unique; à l'extrémité nord, l'ancienne ferme du Clos-Beaucé, transformée en
fabrique rustique devait entrer dans l'ambitieuse conception de ce projet.
La métairie et les anciens communs, otés de la perspective du château
devaient être reconstruits sur la bordure ouest du parc, sans doute sous la
forme du bâtiment, escamoté derrière la végétation. L'ancienne hôtellerie de
l'écu de France, évacuée elle aussi de l'angle nord-ouest, passait de
l'autre côté de l'église, au nord, sous la forme d'un bâtiment comme poste
aux chevaux. A l'angle sud-ouest du Parc un kiosque; à l'angle sud-est, une
nouvelle entrée, "faisant traverser tout le parc", montrent bien cette
volonté de réorienter complètement le château. En fait ce plan "fantastique
pour La Chapelle-Chaussée", comme il l'indique lui-même, ne fut que très
partiellement réalisé: si le tracé général du parc fut adopté, et les
anciens communs le long de la grande route, rasés, les constructions
prévues, nouveaux communs, fabriques, kiosque, le creusement d'une rivière
dans la partie nord, les multiples sauts-de-loup et la nouvelle entrée par
le sud,restèrent à l'état de projet.
Éléments protégés MH : les façades et les toitures du château : inscription
par arrêté du 11 juillet 1966. (1)
château de La
Chapelle Chaussée, 1 chemin de Ronde, 35630 La Chapelle-Chaussée, propriété
privée, ne se visite pas.
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