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Château de la Roche Racan à Saint Paterne Racan
 
 

     La Touraine entière appartient au bassin de la Loire; cependant, vers le nord, une arête peu sensible du sol déverse les eaux en dehors du périmètre et les conduit dans le Loir, limpide rivière qui va se jeter dans la Sarthe et passe, avec celle-ci, dans la Mayenne pour venir se réunir au fleuve médian, à deux lieues au-dessous d’Angers. Aujourd'hui nous allons nous asseoir près dans la commune de Neuillé, au-dessus de l’ancien étang d’Arrailly, dont le ruisseau traverse le sol maintenant eu culture. Il serpente sur le plateau avant de se creuser une vallée; puis, quand celle-ci s’approfondit et se dessine entre de gracieuses collines, le chemin de fer, qui s’y gare, amène le voyageur au pied d’un élégant pavillon qui, bâti sur une plate-forme, à mi-côte du rocher, indique tout d’abord, par son style, l’époque de Louis XIII. Ce château est celui du poète Racan. C’est là, c’est-à-dire dans l’emplacement de la construction aujourd’hui sur pied, que naquit l’auteur des Bergeries; ce château a été élevée par lui; il y a passé la dernière moitié de sa vie, et, selon le témoignage commun, il y a terminé sou existence. À celui qui contemple ce manoir, les réflexions se présentent en foule. Là naquit et vécut un homme issu de haute lignée, qui n’a pas trouvé sa gloire dans les armes comme ses ancêtres, quoiqu’il les ait portées lui-même en plusieurs campagnes; ni la cour, ni les combats n’ont fondé sa fortune ou créé sa renommée; il chercha dans la poésie le succès qu’il ne trouvait pas dans le brillant milieu où se passait sou existence: il ramena sa pensée et sa muse vers le berceau de sa vie, et il y trouva une gloire immortelle. Pendant 15 ans, de Malherbe à Corneille, Racan tint le sceptre de la poésie française.
Racan, comme on le sait, appartenait à la maison de Bueil, qui dès le XIIe siècle apparaît en Touraine avec le nom d’un fief de cette province, représenté aujourd’hui par une commune à l'extrémité septentrionale du département. Ce nom est resté constamment celui de la tige de la famille de Bueil, tandis que les branches se sont parées tour à tour ou simultanément de noms d’autres fiefs importants, soit à l’intérieur de la Touraine, comme Neuvy-Roi, Saint-Christophe, Montrésor, l’Ile-Bouchard, Marmande, Faye-la-Vineuse, la Motte-Sonzay; soit au dehors de la province,, comme Fontaine-Guérin, Brion et le Vieux-Baugé en Anjou, avec Châteaux (Chàteaux-la-Vallière), Vaujour et Courcelles, alors dans la même province; Valène et Courcillon, au Maine, Marans, en Aunis, enfin le comté de Sancerre, en Berry, apporté à la branche de Montrésor par le mariage de Jean IV de Bueil avec Marguerite, fille de Béraud II, dauphin d’Auvergne, comte de Clermont, et baron de Marmande, et de Marguerite de Sancerre, héritière de ce dernier nom, formé par une branche des comtes de Champagne, et illustré par Louis II, de Sancerre, maréchal et connétable de France, oncle de Marguerite. Jean IV inaugura ce glorieux héritage par une mort héroïque à Azincourt, où il remplissait la charge de grand-maître des arbalétriers, laquelle est devenue celle de grand-maître de l’artillerie. Son fils Jean V, comte de Sancerre, prit une part active à l’expulsion des Anglais sous le règne de Charles VII. Il fut récompensé de sa valeur par la charge d’amiral de France, en remplacement de Prégent de Coëtivy, tué au siège de Cherbourg, en 1450.
A une demi-lieue de Villebourg, écrivait, en 1660, le moine Martin Marteau, est le célèbre et noble bourg de Bueil, qui porte le nom des très illustres comtes de Sancerre et de Marans, "qui y ont fait autrefois bastir une très belle église collégiale où ils ont marqué leurs sépultures. Proche de Bueil, est une maison des dits comtes, mais il n’y séjournent point, faisant leur demeure ordinaire au chasteau de Valjoyeux, dit Vaujour, à quatre lieues de là, pour avoir le plaisir de la chasse dans une grande et belle forest qui entoure le dit chasteau". Pierre de Bueil, seigneur de la Motte-Sonzay, frère puiné de Jean de Bueil, dit l’amiral de Sancerre, est l'auteur de la branche d’où sortit notre poète. Son fils Jacques de Bueil, seigneur de la Motte-Sonzay, épousa, en 1458, Louise de Fontaine qui donna son nom à la branche. De ce mariage naquit Georges de Bueil, seigneur de Fontaine, du Bois, de la Roche-au-Moyen et de Crassai. Il se maria deux fois: la première fois à Françoise des Touches; et en secondes noces à Marguerite de Broc; cette dernière union donna le jour à Jean de Bueil, seigneur de Fontaine, époux de Françoise de Montalais-Fromentières, par contrat du 3 mars 1535. Cette union produisit plusieurs enfants parmi lesquels nous nommerons Honorât, Louis, Louise et Jeanne: Honorât, conseiller d’état, vice-amiral et lieutenant pour le roi en Bretagne , capitaine de cinquante hommes d'armes de ses ordonnances, gouverneur de Saint-Malo, fait chevalier du Saint-Esprit par Henri III, le 31 décembre 1583, fut tué à Saint-Malo, lorsque la ville se déclara pour la Ligue. Il avait épousé Anne de Bueil, fille de Louis de Bueil, comte de Sancerre, dont il eut François et Honorât, morts jeunes, et Anne, mariée, en 1594, à Roger de Saint-Larv, duc de Bellegarde, pair et grand écuyer de France, morte sans laisser d’enfants. Louis, seigneur de Racan, conseiller d’État, capitaine de cinquante hommes d’armes, gouverneur du Croisic, maréchal de camp, chevalier de l’ordre du Saint-Esprit. Il avait accompagné Henri IV dans toutes ses guerres, et exercé la charge de grand maître de l’artillerie au siège d’Amiens en 1597. Il fit partage avec son frère aîné, en 1574, et épousa en 1588, Marguerite de Vendômois. Le poète Racan naquit de ce mariage. Louise, abbesse de Bpnlieu, paroisse deDissay et enfin Anne, mariée à Jean d’Acigné, comte de Grandbois et de la Roche-Jagu.
Notre poète naquit donc de Louis de Bueil et de Marguerite de Vendômois; son acte de baptême, inscrit sur les registres de Saint-Paterne est ainsi conçu: "le cinquiesme jour de feburier 1589, nasquit le filz de noble homme Loys de Bueil, chevalier de l’ordre du roy, capitaine de cinquante hommes d’armes, et seigneur de Racan, et fut baptisé par le curé d’Aubigné, nommé Honorât par Cosme, fils de feu Jean Royer, de Saint-Pater, et par Julian Boussard, de Vas". En cet acte laconique, la mère de l’enfant n’est pas nommée; il y a deux parrains et pas de marraine; enfin l'acte ne porte aucune signature. Louis de Bueil est le premier de sa famille qui ait pris le nom de Racan; ce nom était celui d’un fief, consistant en un moulin et une petite ferme dans la commune de Neuvy-Roi, que, selon Tallemant des Réaux , Louis de Bueil aurait acheté le jour même de la naissance de Racan, et imposé aussitôt à son fils. Louis de Bueil avait pris ce nom parce qu’il était cadet d’une branche qui elle-même était cadette. Louis de Bueil, après la naissance de son fils, suivit Henri IV dans ses campagnes guerrières; mais, comme le trésor public était habituellement vide, il y compromit toute sa fortune, qui ne devait pas être considérable, puisqu’elle était celle d’un cadet, il mourut presque insolvable. Racan était alors page du roi, et placé sous la tutelle et protection du duc de Bellegarde, qui parait ne lui avoir jamais manqué, non plus que la bienveillance de la duchesse, sa cousine germaine. Ces circonstances diverses ont dû l’aider à se soutenir à la cour, d'autant plus que ses goûts n’étaient pas somptueux. La guerre, qui avait été la carrière glorieuse de tant de ses ancêtres, ne lui offrit aussi que des déceptions. Sa première campagne fut celle de 1621 qui s’ouvrit par le siège et la prise de Saint-Jean-d’Angely et se termina par le siège infructueux de Montauban. Racan était alors âgé de trente deux ans au moment de ce nouvel apprentissage.
Il a dû faire les campagnes de 1621, 1622, con duites par le roi en personne, contre les protestants; enfin la campagne faite à travers les Alpes, après le siège de la Rochelle, est celle de Savoie et Piémont, terminée par la prise de Suse et Casai, en 1629. Mais tous ses périls et ses exploits se sont passés dans l’ombre; car aucun rapport, aucune chronique ne parle de lui; il s’est exposé avec l’obscurité du dernier soldat. Entre deux campagnes, le mariage de Racan eut lieu à Tours, par contrat du 29 février 1628. Mais les douceurs de l’hymen furent presque aussitôt troublées par l’appel de la guerre. Le roi arriva devant la Rochelle vers la lin de mars, et, si Racan ne l’y accompagna, il dut le suivre de près; il est avéré qu’il se trouva à ce siège célèbre, par un passage des mémoires qu’il a composés pour la vie de Malherbe. Ainsi les deux années qui suivirent son mariage furent réclamées par les devoirs militaires. Mais là se terminèrent ses campagnes; car la mort de la duchesse de Bellegarde vint bientôt changer sa fortune: la duchesse mourut le 1er octobre 1631 en son château du Bois de Neuvy. Le registre des décès manque, à cette date, dans la commune de Neuvy-Roi. Le partage de la succession de la duchesse de Bellegarde, entre Racan et sou cousin Honorât d’Acigné, comte de Grandbois, se fit le 13 mai 1637, au château de Fonlaine-Guérin, près Bauge en Anjou. L’héritage devait se partager, à raison des deux tiers et en outre d’un préciput acquis par les coutumes pour le seigneur de Racan; l'autre tiers venait à la famille d’Acigné. La famille d’Acigné eut, pour son tiers, la châtellenie et terre de la Motte-Sonzay, la châtellenie de la Roche-Béhuard, le Fief-au-Chat, Cangé, Brossesac et l’étang de Bornette, le tout estimé 102,432 livres.
Racan reçut les deux autres tiers de la fortune dont le détail n’est pas exprimé dans le dispositif de la sentence arbitrale, mais il eut à rapporter une soulte de 3,636 livres. Parmi les domaines qui durent revenir à Racan, nous remarquons dans le procès-verbal de prisée: La baronnie, terres et fiefs de Fontaine-Guérin, située au Brion, près Baugé, en Anjou; moitié de la châtellenie, terres et fiefs de Brion (l’autre moitié à la branche de Sancerre) ; le Vieil-Baugé, la Roche-Habillon, le Plessis-Angau, le fief de Bessé-Moulinet, la grande dixme de Beaufort et celle de Marray-les-Marais, la seigneurie de Grez, etc. Cette importante succession le fit passer de la gène à l’opulence. Les seigneuries et sans doute les châteaux de Fontaine-Guérin, le Vieux-Baugé, le Bois de Neuvy-Roi et Valènes, étaient en effet plus importants que la Roche; mais le prestige du berceau l'emporta sur tout le reste. La terre de Valènes fut sans doute vendue pour subvenir à la construction de la Roche-Racan. Parmi les familles les plus fréquemment honorées du parrainage de Racan, de sa femme et de ses enfants, on peut remarquer une famille Gabriel, dont les chefs sont d’abord qualifiés maçons, puis tailleurs de pierre et plus tard architectes. De cette famille sortirent, du vivant de Racan. Jacques et Louis Gabriel, nés à Saint-Paterne, qui se distinguèrent à Paris comme architectes. Selon toute apparence, c’est cette famille Gabriel qui a reconstruit, sous la direction de quelque habile architecte, le château de la Roche, et elle a dû y gagner elle-même ses crayons d’architecte. Le château fui édifié vers 1634, époque où, la succession de Madame de Bellegarde étant échue, il était possible d’opérer la construction, sans attendre le partage qui ne s’est fait qu’en 1637.
L'endroit tenait au cœur de Racan qui y était né: il y avait passé les années de son enfance. La situation est pittoresque; c’est le degré d’un coteau aplani en terrasse. Le pavillon principal, qui seul reste aujourd’hui, est planté au bord de la terrasse; il plonge ses soubassements et ses murs de fondation jusqu’au niveau de la vallée; il a, dans cette hauteur, deux étages voûtés, éclairés seulement au sud et à l’ouest; le plus bas est consacré aux caves, cellier, buanderie; le supérieur est occupé par de vastes cuisines. Le troisième étage, en partant de la vallée, forme le rez-de-chaussée au niveau de la terrasse; il contient les appartements de réception et la cage d’un large escalier conduisant aux étages supérieurs. Le quatrième et le cinquième étages sont destinés aux chambres à coucher; le pavillon se termine par un toit fort élevé, avec des chambres éclairées par d’élégantes lucarnes et contenant les greniers. La hauteur totale du bâtiment, de sa base, du coté de la vallée, au faite de la toiture, est d’environ trente mètres. Les gros murs, fondés sur le roc, ont de trois à quatre mètres d’épaisseur. A l’extrémité ouest, le château est flanqué d’une tour octogone, renfermant aujourd’hui un boudoir à chacun de ses deux étages supérieurs, et terminée au troisième par une terrasse d’où la vue s’étend sur toute la vallée de l’Écotais, depuis Nouillé-Pont-Pierre jusqu’à Saint-Paterne, sur une longueur de deux lieues. Ce pavillon est ce qui reste aujourd’hui; mais la construction de Racan comprenait encore un pavillon de l’autre côté de la terrasse et adossé au rocher supérieur; une galerie étroite et légère les réunissait, laissant au milieu un passage eu portique pour arriver de l’extérieur à la cour d’honneur formée par le reste de la terrasse. Cet ensemble imposant de constructions se termina par une chapelle dédiée à saint Louis, laquelle fut bénite par le curé de Saint-Pater, Jean Maan , alors chanoine prébendé de l’église métropolitaine de Tours, le dimanche 1er novembre 1636. Cette date sert à préciser la construction du château qui se fit nécessairement avant celle de la chapelle, mais après 1631 , époque où fut ouvert l’héritage de Madame de Bellegarde. Le style de cette construction, ferme, très simple et convenablement orné, est en effet celui de la fin du règne de Louis XIII.
Racan eut cinq enfants qui tous naquirent au château de la Roche. Le père Anselme n’en cite que trois, Tallemant des Réaux lui en accorde quatre; nous eu avons trouvé cinq inscrits sur les registres de Saint-Patern. Le 29 janvier 1632, fut inscrite sur ces mêmes registres la naissance du premier enfant et le mardi 2 du mois de mars, a été nommé Antoine. Le 26 juillet 1633, naissance de Loys, et le 2 avril 1634, a été baptisé en l’église de Saint-Pater. Le 26 mars 1636, naissance de Honorât, baptisé par Jean Maan, docteur de théologie de l’université de Paris, curé de Saint-Pater. La naissance d’Honorat fut suivie de près de celle de l’une de ses sœurs; Françoise, née le 20 février 1637, eut pour parrain Jean du Boys, seigneur de Vandenesse, frère de sa mère, et pour marraine Françoise de Montalais, veuve alors de René de Bueil, comte de Sancerre et de Marans. Le dernier enfant de Racan, inconnu de tous les biographes, est encore une fille, nommée Madeleine comme sa mère; elle naquit le 17 janvier 1639 et fut baptisée le 20 du même mois. La fille aînée de Racan, Françoise, épousa, en 1638 , dans la chapelle de la Roche-Racan, Charles de la Rivière, chevalier, seigneur de Bresches, fils de Nicolas de la Rivière, seigneur de Montigny, et de dame Marie de Broc. L’acte est signé des deux époux, et en outre de Racan, de Madeleine du Boys, d’Antoine de Bueil, de Marie de Broc, mère de l’épouse, et de Victor de Broc. C’est la dernière mention que nous ayons trouvée du nom de Madeleine du Boys. Les registres de sépulture étant mal tenus et incomplets, nous n’y avons pas rencontré le décès de l'épouse de Racan (Honorat de Bueil). Quant à celui de Racan lui-même, tous les biographes disent que notre auteur mourut à la Roche-Racan en 1670. Après la mort de Racan, le château de la Roche échut à Antoine, son fils aîné; celui-ci, faible représentant de son père et de ses aïeux, ne prit pas le nom qui avait été honoré par son aïeul sur les pas d’Henri IV, et illustré par la gloire littéraire de son père; il s’appela le marquis de Fontaine-Guérin, surnom de la branche cadette de Bueil, mais aînée de la sienne, que la mort de la duchesse de Bellegarde avait laissé vacant.
Ses habitudes paraissent avoir été pacifiques, et il vivait en bons termes avec ses voisins; mais sans doute il était un homme de peu de moyens, car Tallemant des Réaux, qui ne ménage pas les termes, l’appelle, en son dialecte, "un sot". Il se maria, du vivant de son père, avec Louise de Bellanger, fille de Gilles de Bellanger, seigneur de Vautourneux, château aujourd’hui démoli, dans la commune des Hermites. Dans un baptême du 3 mars 1726, où le parrain est Henri-Pierre-Joseph de Vanssay, seigneur de Courcillon, la marraine est Jeanne-Madeleine-Catherine de Cotignon, épouse de haut et puissant Antoine-Pierre, seigneur de Bueil, lieutenant-général des armées du roi. Deux actes des archives départementales, l’un de 1721, l’autre du 23 avril 1730, mentionnent encore Antoine-Pierre de Bueil , lieutenant-général des années, seigneur de la Roche-Racan, le Plessis-Barbe, le Breuil, Chauvry, demeurant ordinairement au château de la Roche. Mais, plus tard, le même Antoine-Pierre, devenu veuf, sans enfants et fort âgé, vendit la terre de la Roche, le Plessis-Barbe, Tliorian et quelques autres domaines, par acte de Gervaise, notaire à Tours, le 2 novembre 1745, à Michel Rolland des Ecotais, seigneur de Chantilly et Armilly, pour la somme de cent mille livres, dont trente mille payées comptant, et soixante-dix mille réservées entre les mains de l'acquéreur, pour représenter une rente viagère de douze mille trois cents livres que celui-ci s’engagea à payer. Le décès du marquis de Bueil suivit de près cette vente, car il arriva on 1748. Ainsi s’éteignit la postérité du poète Racan, et ainsi disparut de la Touraine la famille de Bueil, l’une des plus considérables et des plus illustres de la province. Déjà la branche aînée, celle des comtes de Sancerre et de Marans, seigneurs de Vaujour et Saint-Christophe, avait fini en 16G5 avec Jean VIII de Bueil, mort sans laisser de postérité de son épouse Françoise de Montalais; cette branche avait légué à la famille de Terrien, son alliée, le droit de porter le nom et les armes de Bueil. Cette famille illustre est-elle éteinte? On nous a affirmé que le nom de Bueil est encore porté en Champagne par une famille honorable qui dit se rattacher à celle de Touraine.
La famille des Ecotès ou Lcotez, suivant l’orthographe usitée par elle avant l’achat de la Roche-Racan. Cette famille résidait sur le territoire de Neuillé avant même d’acquérir Armilly; elle prenait le titre de seigneur de Chantilly, nom d'un fief dans la commune de Courcelles, près de Chàteau-la-Vallière. La famille des Ecotez, devenue puissante par suite d’une acquisition dont le sort avait acquitté une bonne partie par la prompte mort du marquis de Bueil, fit ériger un comté de ses principaux domaines. Le comté des Ecotais, érigé en 1754, comprenait ainsi cinq domaines dont le château de la Roche-Racan était le chef-lieu. On s’efforçait de donner à ce château le nom des Ecotais mais le peuple continuait à l'appeler la Roche, et grâce à sa persévérance, fort étrangère à toute considération académique, le nom du berceau de Racan n’a pas été effacé. Les nouveaux titulaires du comté avaient modifié l’orthographe de leur nom peu de temps avant l’acquisition; ils signaient des Ecotais au lieu de des Ecotès. La famille des Ecotais émigra en 1791; ses biens furent saisis et vendus au sieur René, devenu adjudicataire du château de la Roche; on vendit presque toutes les terres en détail. René céda, en 1818, le château avec les terres et les bois qui restaient, au sieur Mabille; une fabrique de poterie fut alors établie dans le château; les cours, les écuries et jusqu’aux cuisines furent envahies pur les tours à potier et par les ustensiles accessoires de cette industrie. Au sieur Mabille, qui avait encore fait diverses aliénations partielles, succéda, en 1826, un sieur Bardou l’Héraudière. Après celui-ci, le comte de Chalot vint avec la comtesse son épouse, veuve du célèbre tragédien Talma, prendre possession du château du chantre des Bergeries; mais il le rétrocéda presque aussitôt.
Ce qui restait en 1830 de la propriété et le château en fort mauvais état, furent acquis par un ancien instituteur, M. Bodin, originaire de Saint-Paterne; ayant été frappé en 1832 par le choléra qui lui paralysa les quatre membres, il se retira à la Roche-Racan, et malgré la cruelle infirmité qui sévissait contre lui, il se livra courageusement à des éludes littéraires en même temps qu’il continuait l’exploitation de la fabrique de poterie, devenue assez renommée dans le pays. Enfin, en 1845, cent ans après que le domaine de la Roche fut sorti de la famille de Bueil, M. Bodin vendit le château, quelques terres encore attenantes, et une ferme de son propre patrimoine à M. Huet, avocat à Taris. Le château, tout délabré après tant de vicissitudes, et par les soins de M. Huet, reconquis sa dignité première: le parc, les jardins, les cours, les écuries ont été rétablis comme ils durent être à leur origine; un vestibule a été construit pour suppléer à la démolition de l’aile en galerie et portique qui fermait la cour et reliait le château au pavillon de la chapelle; il offre une entrée plus modeste, mais plus commode que l’ancien péristyle. En haut de la façade occidentale, deux grandes ligures de chimères sculptées, appliquées en relief sur le mur, gardaient entre elles jadis l’écu de Bueil (d’azur au croissant montant d’argent accompagné de six croix recroisetées, au pied fiché d'or), qui sans doute avait fait place à l’écusson des Ecotais, en attendant que la Révolution vint à son tour effacer celui-ci. Ces armes de Racan ont été rétablies et heureusement agencées avec le cadran d’une horloge dans l’espace réservé entre les deux chimères; le casque à cimier qui couronnait le tout n’avait pas été détruit en raison sans doute de son élévation qui ne permettait pas de l'atteindre. Après de longs jours de deuil, la demeure bâtie par Honorât de Bueil semble avoir retrouvé sa splendeur première; grâces soient donc rendues à M. Huet, par qui le château de la Roche-Racan a été restauré avec le zèle et le respect dus à son fondateur, le culte de Racan y est remis en honneur, et il semble que l’auteur des Bergeries, momentanément absent de sa demeure, y soit attendu en des appartements toujours prêts à le recevoir. (1)

Éléments protégés MH : le pavillon de l'aile gauche, son soubassement et sa tourelle octogonale ; les restes du pavillon de l'aile gauche (escalier de l'ancienne chapelle et ses murs) : inscription par arrêté du 6 mars 1947. (2)

château de la Roche Racan 37370 Saint Paterne Racan, après la succession de trois propriétaires au XXe siècle, le château appartient depuis 1963 à M. Marcel Brakers de Hugo, qui a su l'entretenir et le conserver avec passion. Tel. 02 47 29 20 02, ouvert au public du 6 juillet au 14 août inclus.

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source de la photo par satellite : https://www.google.fr/maps
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 château de la Roche Racan

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(1)        Le Château de La Roche-Racan, par Charles Mourain de Sourdeval. Imprimerie Ladevèze, Tours (1865)
(2)   
    source :  https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/

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