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En fait aussi paradoxal que cela puisse
paraître étant donné la proximité des deux châteaux, Brassac-de-Belfortès et
Brassac-de-Castelnau ont toujours eu dans l’histoire une vie administrative
indépendante. Chacune des deux communautés avait un blason différent, et les
armes de Brassac-de-Castelnau étaient "Palissé de deux pièces et demi de
gueules à deux pièces et demi d'argent". Brassac-de-Castelnau eut par contre
une histoire bien plus agitée que le château voisin de Brassac-de-Belfortès.
Après avoir été dans l’apanage du comte de Rouergue, le château passa par
héritage aux comtes de Toulouse, jusqu’à l’époque de la croisade des
Albigeois où Simon de Montfort donna Brassac à Sicard Alaman sous la
suzeraineté de Philippe de Montfort. Le 25 août 1356, Brassac-de-Castelnau
fut érigé en comté pour Jean VI de Vendôme. Ensuite, l’on trouve la trace
d’un Sicard de Brassac en 1415, puis d’un Yzarn de Brassac en 1459, mais les
documents demeurent rares sur cette époque. L’on ignore donc si c’est par
vente ou par voie d’héritage que Brassac-de-Castelnau passa à une noble
famille castraise: les La Palu, dont la race est attestée dans la région dès
le milieu du XIIIe siècle. Jean de La Palu devint dès 1525 seigneur de
Brassac. Un quart de siècle plus tard, face aux Guilhot de Ferrières et à la
puissante faction protestante, les La Palu représentaient les forces vives
du parti catholique. D'ailleurs, les La Palu avaient fort à faire pour
lutter contre les protestants car, outre les convictions religieuses
divergentes, une haine ancestrale opposait les Guilhot aux seigneurs de
Brassac- de-Castelnau. En fait, Brassac entravait par sa situation la
liberté du commerce avec la Montagne et peut être convient il de ne pas
aller chercher plus loin l’origine de ces sombres inimitiés dont le XVIe
siècle tarnais eut le secret.
En 1565, Catherine de La Palu devenu veuve eut beau se plaindre au roi du
pillage de son château par Guilhot de Ferrières, même les ordres de Charles
IX n’eurent pas raison du soudard. Ce qui devait arriver arriva et, la
guerre ayant éclaté, après un épouvantable feu d’artillerie dirigé contre
les remparts, Brassac-de-Castelnau fut pris le 21 juin 1569 par le baron de
Biron, chef des religionnaires. La châtelaine Catherine de Narbonne fut
massacrée par la soldatesque et la ville fut démantelée par les vainqueurs.
Seul le jeune Sébastien de La Palu en réchappa et rejoignit Montmorency.
Après 1573, soudoyé par le même Montmorency bien qu’à priori protestant
zélé, le sinistre capitaine Bacou s’installa dans la château de
Brassac-de-Castelnau, au mépris des droits des Roquefort de La Palu, et se
fit bientôt appeler "monsieur de Brassac", ne cessant de mettre les environs
à feu et à sang. Comme la population excédée voulait en finir, Montgomery et
son armée vinrent loger à Belfortès chez Balthazar de Soubiran et ils
parvinrent à attirer Bacou en ce château. Capturé, le capitaine fut ramené
chez les La Palu, massacré, puis jeté dans l’Agout par l’une des fenêtres de
l’actuelle mairie. Après cet épisode barbare, Brassac ne fut plus mêlé
qu’indirectement aux querelles des deux partis et, lors des guerres de
Rohan, la ville n’offrit que peu de résistance. Le château de
Brassac-de-Castelnau fut tout de même mis sous séquestre en 1626 et des
soldats en profitèrent pour piller tous les objets de valeur. Néanmoins, à
la suite d’une plainte, ils durent rendre les fruits du larcin à monsieur de
Roquefort de La Palu.
En 1629, l’Édit de la Paix d’Alès accordé par Louis XIII rétablit le calme
et fut l’amorce d’une grande prospérité liée non seulement au textile, mais
aussi aux forges, comme le montre à Anglès l’exemple de Monségou. Néanmoins,
à la différence de ce dernier site qui produisit jusqu’au XIXe siècle,
Brassac dut éteindre ses feux dès 1783, car le marquis de Brassac,
propriétaire des forges, avait dépensé plus de 60000 livres et brûlé tous
ses bois. La famille de Juge eut la seigneurie de Brassac et du Bez du XVIIe
siècle jusqu’à la Révolution, portant le titre de marquis de Brassac. Durant
la Terreur, après avoir eu des démêlés avec la population quelques années
plus tôt, le sieur Armand de Brassac jugea préférable de se réfugier dans
une cachette du pont-vieux où il fut malheureusement dénoncé par l’un de ses
anciens domestiques. Il fut incarcéré à Castres le 5 nivôse an II et, la
même année, fut installé dans le château un atelier de fabrication de
salpêtre, afin de pourvoir les soldats en "poudre tyrannicide", charmant
néologisme inventé par les révolutionnaires du cru. Armand de Brassac fut
libéré le 4 brumaire an IV, et le dernier seigneur de Brassac mourut
paisiblement en 1799. Situé sur la rive droite de l’Agout, Brassac-
de-Castelnau est construit sur le roc, à la place d’un château fort primitif
édifié au XIIIe siècle.
Dans son état actuel, le château présente du côté de la rivière une façade
de prés de cinquante mètres de long fortement remaniée au XVIIe siècle et à
diverses époques mais encore très intéressante. Cette façade se présente
comme un long rectangle à deux niveaux d’une douzaine de travées régulières.
Les grandes fenêtres classiques à petit carreaux ont été soigneusement
redistribuées au XVIIe siècle et pourvues d’un encadrement très sobre, les
ouvertures de l’étage ayant reçu comme simple animation un claveau
légèrement saillant. Sur cette façade viennent s'engager deux tours
circulaires dont l’une a conservé sa toiture pointue tandis que l’autre,
arasée au niveau de la toiture du logis, a reçu un comble à faible pente. Le
soubassement de cet imposant bâtiment construit sur la rivière est encore
taluté. On peut imaginer l’aspect primitif du château quand on sait qu’il
possédait deux ailes comportant des arcades, un escalier monumental en
marbre à l'emplacement actuel de la poste, ainsi qu’une terrasse qui
dominait l’Agout, là où se trouve actuellement le Pont-Neuf. Réenduit, doté
de belles ouvertures à petits carreaux, le noble et austère château de
Brassac de Castelnau a subi une restauration qui, si elle porte encore un
visage trop neuf, fut une opération de grande qualité. (1)
château de Brassac de Castelnau 81260 Brassac, propriété de la commune,
maison commune.
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